Les onze frères et sœurs vivement bercés par  » Les Trois Frères « 

Cette chance m’ a été donnée par André Kervot, notre collègue du CEAS et équipier aux Amis du Sinagot, qui organisait pour nous, intervenants du CEAS, une journée sur la célèbre chaloupe « Les Trois Frères ».

Mercredi 8 Juin 9 h 30 – Port Anna ensoleillé mais avec une bonne brise (force 3, 4) ciel tout à fait dégagé, nous attend.

L’équipage se compose d’André L, le skipper qui connaît le Golfe comme sa poche, Alain P et André K. Les huit passagers embarquent sur « La petite sœur » (l’annexe) pour rejoindre le fameux bateau.

Découverte – C’est un bateau en bois, un mélange de chêne et de sapin pour la coque, le pont, les mâts et les vergues… pas de bôme. On s’y sent à l’aise, l’espace n’est pas étroit .

Nous rangeons les sacs de pique-nique dans le Bi ou l’équipage d’autrefois pouvait se reposer entre deux marées où même dormir quand il partait pour plusieurs jours.

Premières manœuvres  : Hisser le Taillevent ! Pour cela on accroche la vergue au rocambeau. Puis il faut se mettre à deux (au moins) pour hisser cette belle voile, encouragés par de puissants « Oh hisse ! « Oh hisse ! ».

C’est le tour de la misaine.

Ce voilier, coque noire et voiles ocres a … une sacrée allure !

Le vent de nord-est permet de sortir du Golfe en vent arrière, les voiles parfois en ciseaux subliment encore le spectacle. Nous glissons littéralement.

Cette allure donne sensation de facilité car les manœuvres sont réduites.

Boëdic : Au passage nous saluons le Moine d’un coup de blanc sec et d’une prière.

Ensuite défilent les îles : Il y en a de tous les côtés, des petites, des moyennes, des grandes, des plates, des rocheuses, des sévères (elles sont rares ) beaucoup de charmeuses… !

Drennec, Arz, Les Logoden, Holavre, Pirenn, Mouchiouse, Irus et Brannec ( l’île   qu’André K rêve d’habiter…….. dans une autre vie !).

Pour garder des souvenirs de cette journée, certains embarquent sur la  » Petite Sœur  » pour mitrailler « Les Trois Frères « . André L le skipper s’en donne alors, à cœur joie : il laisse filer le Sinagot au  » largue  » dans la baie de Kerdélan, le faisant marcher à vive allure et provoquant par là une forte gîte. Le cœur chavire mais pas le bateau !

Cette rapidité chez un bateau de travail est étonnante, mais grâce à l’équipage nous apprenons qu’il est le dernier « VRAI » Sinagot, qu’il a été construit en 1943 par le chantier Y Querrien pour Patern Lefranc et qu’il est resté armé pour la pêche jusqu ‘en 1954 .

« Les Trois Frères » a été classé monument historique. Il existe à l’heure actuelle cinq Sinagots dont quatre copies, ils sont utilisés pour la plaisance. Dire qu’en 1930 il y en avait 170 dans le Golfe ! Souvent poursuivis pour fraude par les gardes maritimes, les pêcheurs réussissaient à s’échapper grâce à la vitesse de leurs voiliers et à la …ruse !

Les noms de leurs embarcations sont particulièrement évocateurs : Cours après », « Scieuse de lames », » l’Imprenable », »Vainqueurs des jaloux », « Bois sans soif », « On les aura ».

Passage Délicat  : Nous arrivons entre les îles Berder et de la Jument dans un goulet où les courants se renforcent et se contrarient en tourbillons dangereux : il faut passer « La Jument  » en évitant de se faire drosser sur les roches immergées. C’est à cause de ce passage extrême – nous dit André L que le Golfe n’a pas été retenu comme port de commerce avec la compagnie des Indes. Destinée !

Gavrinis nous salut de son tumulus vieux de 6000 ans, Er Lannic de ses Cromlech qui de loin à contre jour, dessinent la crête d’un monstre préhistorique. Golfe lieu mythique, sacré !

Nous passons ensuite devant la pointe de Kerpenhir dernier courant avant l’océan.

Pique Nique  : Nous mouillons à l’abri du vent devant la plage de port Navalo. Ambiance à la plaisanterie, beaucoup de blagues fusent de tout côtés, à tribord comme à bâbord, après un petit muscat bienvenu, on casse la croûte. Lumière extrême, teintes vives, brise océanique, mer fraîche (trop pour la baignade).               

Fin de repas, André L toujours plein d’attention pour ses passagers annonce :

 » On prend un ris ! « 

Stupéfaction sur le pont et protestation timide  » On a assez mangé »

Preuve que notre vocabulaire maritime pourtant bien enrichi depuis Port Anna a encore quelques lacunes !

Retour  : Pour entrer dans le Golfe il faut attendre la « Renverse « qui n’est pas toujours à l’heure ! Puis avec le vent « debout » il faut tirer des bords en évitant toutes sortes d’obstacles : Optimiste, caseyeurs, hors- bord de parisiens branchés et inévitablement :    » le Faucheur « ,  » le Grand Mouton « , « le Grégan  » …… !

Le skipper tient bon la barre, concentre particulièrement son attention sur les courants   et sur… une balise verte entourée d’écume bouillonnante ! (le Grand Mouton ).

Le voilier file à pleine vitesse, fait voler l’écume, les virements de bord sont nombreux, les ordres du barreur tombent avec clarté :  » choque   la misaine ! « ,  » borde la grand-voile ! « , » parés à virer ? « 

Les passagers s’appliquent, moins bavards que devant la plage de Port Navalo, ils sont impressionnés par la précision des manœuvres et la force du spectacle !

Quand les risques sont écartés, le skipper confie volontiers la barre aux volontaires : pas facile à tenir, forte et hyper sensible à la fois !

Le Sinagot « Les Trois Fréres  » n’est pas un cheval de trait, c’est un pur sang !

Fin du voyage : Il est 17 heures nous rejoignons le « corps mort »quitté ce matin.

nous avons passés huit heures ensemble, nous avons l’impression que le temps sur l’eau a duré différemment.

Alors le visage cuit par le vent et le soleil, nous remercions nos trois hommes d’équipage pour : leur savoir faire, leur bonne humeur et leur cours de vocabulaire maritime (que nous n’utiliserons pas au CEAS, sauf en niveau 4 peut-être !).

Enchantés par cette autre façon de découvrir le Golfe, nous nous promettons de revivre un jour – mais sans trop tarder – cette aventure.
Une Sinagote : Jocelyne
Cliquer sur les images pour les agrandir.

 

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